Les enfants avaient envahi l’espace réduit du seul débit de boisson d’Arslanbob. Derrière les barreaux, ils défiaient en riant l’étrangère et son appareil.” Photo, photo ” s’exclamaient-ils en prenant la pose sous l’objectif. Candide et malicieux, énigmatique et doux à travers les barreaux blancs, le velours unique d’un regard gris plonge vers moi. Et le temps se fige.  Arslanbob/Kirghizistan/2009

La mariée ouzbek ne sourit pas. Alors que tous s’amusent autour, boivent et dansent, elle reste aux côtés de son mari, yeux baissés enfermée dans son voile, fragile poupée de tulle et de paillettes qui hoche mécaniquement la tête. Car la mariée ouzbek ne sourit pas, c’est comme ça, c’est la tradition. L’espace d’un instant cependant son visage peut s’éclairer, ses fossettes se creuser et ses yeux se […]

L’oiseau de fer est entré dans la gare et chacun s’est tu. Crissant sur ses rails, crachant sa fumée blanche, il s’est immobilisé dans un râle épuisé. Chacun s’affaire maintenant, autour de l’oiseau bleu des Himalayas qui depuis des décennies à la force de son antique locomotive à vapeur, part sur ses rails de poupée à l’assaut des plantations de Darjeeling. Le rêve des enfants est devenu jouet […]

L’étrangère sortait toujours chasser avant que le soleil se couche, à cette heure dorée où il réchauffe le monde de ses derniers rayons. L’oeil à l’affût, l’appareil à la main, elle guettait les reflets cuivrés dont il pare toutes choses, recueillant précieusement les images dont elle se nourrirait plus tard. L’enfant l’avait aperçue. Laissant la les siens, il a couru vers elle maladroit sur ses petites jambes et […]

Mes yeux ont croisé son regard d’ambre liquide et je suis restée interdite, mais la petite vendeuse de souvenirs avait déjà passé son chemin. Il m’a fallu quelques secondes pour décider de lui courir après, quelques jeux de fossettes pour la convaincre de poser et tandis qu’elle souriait timidement sous mon objectif, les passants indiens l’encourageaient gentiment : « Yes, she’s right, you are very beautiful ! » Haridwar/India/2010 […]

  Harnaché de bicyclettes, assailli de passagers jusque sur le toit de ses wagons, le géant de fer avance lentement, pesamment sur ses voies étroites. C’est le seul et unique train du Népal et au travers des plaines crayeuses du Téraï, il relie à la frontière indienne la ville sacrée de Janakpur où il y a 3000 ans Rama a épousé Sita, donnant naissance à l’une […]

  Un blouson immense, un travail d’adulte : le petit homme du quai, qui vend ses beignets pour quelques aryaris, n’est pourtant qu’un enfant. Un enfant minuscule, qui regarde passer des trains immenses, sans cesse, les uns après les autres. Rêve-t-il de monter un jour dans l’un d’eux, pour s’échapper, partir un peu plus loin ? Je ne sais… Les rêves du petit homme du quai restent […]

  Traits atténués, contours tremblés, réel et reflet se fondent au crépuscule. Qu’il y a-t-il au-delà de la douce silhouette, au-delà du sable, vers le large ? Un horizon de nuit, l’horizon des rêves, peut-être une autre monde. Ici, le jour s’envole dans un miroir de sable. Pangandaran/Java/2007 Texte Marie Sirinelli    

  Le soleil vient de se lever, illuminant de rose les brumes du lac. Silence ouaté des premières heures du jour, des pas menus résonnent sur le vieux bois du pont. Dans la quiétude des aubes birmanes, un garçonnet part pour l’école, promesse d’une conscience qui s’éveille à la beauté du monde. U Bein/Burma/2009  

Nous fûmes réveillés à 5h ce matin-là par les chants psalmodiés des novices, le quotidien d’un monastère. Puis pieds nus dans l’aube frisquette, ils sont partis en file indienne quêter cette nourriture qu’ils n’auront plus le droit d’absorber après midi. Petits fantômes au crâne rasé, à la robe pourpre. Une Enfance Ailleurs… Kalaw/Burma/2009

  Il pleuvait à grosses gouttes sur Angkor Wat mais cela n’avait pas l’air de déranger les deux novices assis sur la rambarde. Ni moi non plus d’ailleurs, qui les mitraillais depuis un moment déjà. Puis l’un s’est retourné et devant son regard douloureusement surpris, je me suis sentie honteuse. Alors j’ai rangé mon appareil et je suis allée lui parler. Angkor Wat/Cambodia/2007  

Maquillée au thanaka, la fillette prenait gravement la pose sous l’oeil attendri de sa mère. Quelques heures après elles sont descendues de ce slow boat qui relie Mandalay à Bagan en 15h. La mère a noué sur ses cheveux la coiffe particulière à son ethnie et je les ai regardées s’éloigner dans la poussière de chars à boeufs d’un autre âge. Mandalay/Burma/2009

  Faut-il que les couleurs se soient donné le mot ? Complémentaires, telles un autel éclatant, elles ne semblent s’unir que pour soutenir ce regard rond, doux, précieux. Comme il faudra au monde du cran et de la rigueur, pour être à la hauteur de ce regard ! Chacun, à sa place, devra faire ce qu’il peut. L’aventure ne fait que commencer… Salta/Argentina/2008 Texte Marie Sirinelli   […]

Comme une offrande au crépuscule… Qui donc avait offert à la plage ces deux enfants paisibles ? Peut-être la mer, en réparation d’un péché passé, avait-elle simplement déposé sur le sable ce présent inouï ? Deux petites âmes humaines poussées par la marée… Jimbaran/Bali/2005 Texte Marie Sirinelli  

Le Dieu du fleuve observait délicatement l’enfant. Ne pouvant la quitter des yeux, il goûtait la grâce innocente de chacun de ses gestes. Lorsqu’en riant elle fit jaillir mille gouttes d’or, il sut qu’il n’aurait jamais plus rien d’autre à réaliser, de plus important à accomplir, que de veiller sur elle. Alors, il oublia qu’il était Dieu, et se changea en pierre. Pour rester là, désormais, toujours auprès d’elle. […]

Une fin de journée à Trinidad. Dans les ruelles multicolores aux pavés inégaux, le joyeux brouhaha des enfants qui jouent après l’école. Un bâton, le bouchon d’une bouteille en plastique et la partie s’engage, sous l’œil attentif des filles. Vous saviez que le baseball était sport national à Cuba ? Trinidad/Cuba/2008

Une maison de poupées offre au soleil birman sa symétrie minutieuse. A chaque case sa couleur, à chaque case son occupant, le puzzle gracieux protège du hasard tous les possibles du quotidien. Gardiens paisibles de cette fragile miniature, les buffles veillent, en témoins bienveillants de l’ingéniosité humaine. Kalaw/Burma/2009 Texte Marie Sirinelli  

La jolie robe rouge de petite fille modèle paraissait tellement incongrue dans cette cour crasseuse des environs d’Antananarivo que j’ai aligné les trois enfants pour les prendre en photo. Un sourire édenté, un regard malicieux, l’enfance se moque de la misère. Après ils m’ont demandé des stylos. Antananarivo/Madagascar/2006